Le 05 mai 2022, la deuxième édition de la table théologique a eu lieu dans le centre œcuménique de Lucens. Les participants ont, pendant 2 heures, réfléchi, partagé, écouté, médité à propos du rite, du culte et de la fonction de prédicateur. Les discussions ont été très riches et vives, avec des moments de partage d’expériences plus personnelles. En voici quelques traces.

LE RITE ET LE CULTE

Qu’est-ce qu’un culte ? Un service funèbre est-il un culte ? Il n’est pas aisé de poser une définition nette et précise sans contexte. Une des particularités du culte est d’être un rite, dans la mesure où les participants entrent dans quelque de préétabli. Ce cadre va nous permettre de vivre quelque chose. Le rite et le culte sont des lieux d’expérimentation de l’Évangile, ils sont donc inclus dans la question plus générale de la pertinence actuelle du message biblique. 

Le culte visibilise la communauté, si bien qu’on peut souvent associer les paroissiens à « ceux qui viennent au culte le dimanche matin ». Le rite cultuel nous fait advenir, ensemble, comme enfant de Dieu. Alors quid du « pratiquant non-croyant » ? L’aspect social est fondamental dans le culte ce qui fait que certaines personnes ne viennent que pour rencontrer d’autres gens, pour la musique ou pour l’apéro qui suit. Pourquoi ne pas penser l’apéro comme faisant partie intégrante du culte ? Après tout, dans la Diaconie, il est possible d’expérimenter le message biblique sans même l’avoir entendu. L’apéro n’est plus un « après-culte » (transition entre le cadre du rite et le retour à la vie quotidienne) mais peut faire partie entièrement de la mission de la paroisse. Attention cependant au risque d’entre-soi ! Cet avertissement est élargi aussi au temps liturgique et pourquoi pas également à la sainte-cène. Dans de nombreux lieux, le moment de la communion est un temps très solennel, axé sur l’intériorité. Il pourrait être intéressant d’ajouter plus d’opportunité de contact dans le culte, un chant joyeux qui invite à se regarder, se prendre le bras ou les mains. Une expression communautaire pas seulement verbale mais aussi physique. Cela fait penser spontanément au baiser ou geste de paix, finalement très rare, voire absent dans beaucoup de communauté. 

Après ce partage bouillonnant d’expériences personnelles, un petit résumé a permis de tirer des grandes lignes pour soutenir une mise en pratique de cet élan crée dans la discussion :

  • Ne pas tout changer ou révolutionner : le risque de faire de l’événementiel est très présent. De plus, c’est un effort presque inutile. Repenser et vivifier des endroits préexistants (horaires, lieux, groupes,…) 
  • Garder l’humilité et la confiance qu’ils se passent bien plus de choses dans le cœur des gens que ce qu’on peut penser ou voir.
  • Ne pas penser qu’au verbal. Voir, toucher, sentir, entendre (y compris le silence), solliciter les arts, faire circuler la Bonne Nouvelle. 
  • Offrir l’opportunité de faire résonner le message du culte avec toutes ses parties liturgiques (baiser de paix, apéro, annonces, …). Des moments où l’on peut faire la « contamination » de ce qui a été dit. 

THEOLOGIEN ET PREDICATEUR : TOUS PASTEUR ? 

Dans l’EERV, le pasteur est nécessairement un théologien puisque le master en théologie est un prérequis pour entrer en formation pastorale. Mais qu’est-ce qu’un théologien, s’il n’est pas pasteur ? La prédication est-elle subordonnée à la théologie ou au pastorat, ou peut-elle être enseignée comme un métier à part ? Est-il seulement possible de répondre à ces questions sans la dimension institutionnelle ? 

Une des pistes pour entamer la discussion a été de rappeler que la théologie réformée distingue entre le proprium ou ce qui n’est pas le proprium d’une personne pour identifier ce que l’on consacre (la notion de consécration était au cœur du démarrage de cette discussion).  

Le gros de la discussion s’est surtout cristallisée autour de la prédication. L’EPUDF (église protestante unie de France) a été citée en exemple, car elle exige une reconnaissance pour la prédication. Si une personne prêche ponctuellement, elle peut le faire sous mandat du conseil de paroisse. L’attribution de ce mandat est du ressort du conseil régional et c’est lui qui pose ces exigence de formation.

Mais qu’en est-il de la distinction entre le prédicateur-laïque et le prédicateur-laïque-théologien ? Pour une partie des participants, l’envie était grande de demander à ce prédicateur-théologien pourquoi il ne devient pas pasteur. Pour d’autres, la fonction pastorale est devenue un cumul de différents métiers, dont celui de prédicateur. Pasteur et prédicateur ne sont pas des substituts. La professionnalisation du pastorat et les changements dans le monde du travail affectent forcément les ministères et la pénurie des forces pressent un peu l’institution dans son évolution. Car si elle doit tenir compte d’une composante théologie et dogmatique, elle est aussi soumise à une composante pragmatique (administration, loi du travail, et bien d’autres choses encore).

Au final, le groupe termine avec l’énumération de catégories qui peuvent soutenir les questions personnelles en lien avec la vocation (d’une manière générale, et pas juste pastorale) :

  • Le don (à quoi suis-je bon ?)
  • La mission (à quoi suis-je appelé ? Comment je ressens la mission que Dieu me confie pour ma vie ?)
  • L’équilibre (de quoi ai-je besoin pour effectuer cette mission ? Quelles ressources et plaisirs me soutiennent pour que je puisse continuer à donner ?) 

L’autrice

Céline Jaillet est pasteure de l’Eglise Réformée Evangélique du canton de Vaud dans la paroisse de Moudon-Syens.